Françoise Pinzon-Gil, la force du changement

‘J’aimais profondément mon travail, parfois au détriment de ma présence auprès de mes deux filles Aurélie et Katia. Cette passion avait, je crois, pris le pas sur la relation qui m’unissait depuis 25 ans au père de mes filles. J’ai l’intime conviction que les valeurs qu’il m’avait inculquées (justice sociale, partage, etc.) me donnaient une légitimité, une existence qui, un jour, m’ont semblé primordiales (dans le sens : prendre le pas sur). Mais plus j’avançais sur un plan professionnel, exposé, une vraie mise en pratique, plus je m’éloignais de ce qu’il ne professait qu’en « théorie ». Je serai toujours reconnaissante au père de mes filles de m’avoir « ouvert les yeux ».

J’ai simplement eu l’inconscience et le courage de mettre ces nouvelles idéologies en pratique. Nous avons eu la chance d’avoir deux filles magnifiques, de vivre 25 années de découverte, bonheur, puis peu à peu d’éloignement et d’incompréhension. Après ces 25 ans j’ai décidé de mettre vraiment en pratique tout ce que j’avais vécu, sans mentor. Et de vivre, avec tous les risques que cela comportait, une vie « sans filet » – ne plus me réfugier derrière le rôle d’épouse, le rôle de mère. Mes filles poursuivaient leurs solides études, je leur avais donné, il me semble, ce que je n’avais pas reçu enfant : amour, attention, confiance. La séparation de leurs parents a été malgré leur âge et leur indépendance un choc.

J’ai entamé une nouvelle vie, uniquement centrée sur mon travail et le bonheur de continuer à grandir, apprendre et oser.  Il n’est pas simple de passer 38 ans dans une organisation telle que l’UNESCO, où les réseaux d’influence et le « politiquement correct » règnent en maître. J’ai tout à fait conscience d’avoir accompli ce parcours grâce à la confiance de directeurs éclairés qui ont cru en moi, à mon éloignement permanent du Siège, mes escapades choisies auprès des « vrais » démunis, ceux pour lesquels nous oeuvrons et signons des conventions. Je n’oeuvrais pas en mots, ni par de grands discours –mais par des actes, des résultats à travers la réussite des projets. Rencontrer à chaque voyage de véritables humanistes qui mettaient leur vie au service de la lutte contre l’injustice, au prix parfois de leur propre vie, donne une autre dimension aux querelles de chapelle et différends administratifs.

 J’avais sincèrement souhaité travailler au-delà de 60 ans au sein de cette organisation qui m’avait donné la possibilité de vivre toutes ces expériences, en respectant mon indépendance et ma prise de risques. Mais des accidents de santé non anodins m’ont fait prendre conscience que mon solide corps de bretonne qui avait résisté aux températures les plus extrêmes en de courts laps de temps (-45° en Sibérie, puis +35° en Thaïlande en l’espace d’une escale à Paris) ne supportait plus les contraintes « administratives » imposées par de nouveaux codes. Je ne peux expliquer davantage.

J’ai donc décidé, très affectée, de cesser mes activités début 2009. Une rupture du genou à Moscou en février 2008 (suivie d’un rapatriement sanitaire), un déchirement du pied après les funérailles de Sœur Emmanuelle à Notre-Dame (choc des cultures ? recueillement unanime face au travail de Sœur Emmanuelle versus un retour aux tracasseries administratives..), une double hernie cervicale, et enfin les deux vis plantées dans mon genou pour me permettre d’avancer m’ont convaincu de penser à une autre vie.’

Nous verrons ensemble dès la semaine prochaine, comment notre femme d’action a trouvé sa recette personnelle pour continuer sa vie solidaire tout en s’engageant pour sa famille.

2 commentaires pour “Françoise Pinzon-Gil, la force du changement”

  1. Richard le 15/04/2012 à 08:44 Richard

    Merci pour ce partage de femme exceptionnelle, quelle vie riche de rencontres et de voyages, on a envie de connaître la suite !

  2. christine dejachy le 30/11/2012 à 06:04 christine dejachy

    A BIENTOT CHERE SOIZIC ! UN BESAZO ENORME – LA PAYA

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